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BOVINS LAIT
14.08.2018

Un droit fondamental pour toutes les éleveuses et tous les éleveurs laitiers

La Confédération paysanne a fait inscrire le principe du droit au repos hebdomadaire des éleveuses et éleveurs laitiers dans le plan de filière issu des Etats généraux de l'Alimentation. Explication d'Yves Sauvaget, paysan dans la Manche, un des deux représentants du syndicat au conseil d'administration du Cniel, l'interprofession du lait de vache.

Campagnes solidaires - Dans son discours prononcé à Rungis le 11 octobre 2017, dans le cadre des Etats généraux de l'Alimentation, le président de la République demandait aux interprofessions d'élaborer « des plans de développement et de transformation ». L'interprofession laitière a élaboré le sien (1) dans lequel la Confédération paysanne a obtenu l'inscription du droit au repos hebdomadaire des éleveurs laitiers. Pourquoi cette proposition ?

Yves Sauvaget - Les éleveuses et les éleveurs laitiers travaillent sept jours sur sept, assurant la traite deux fois par jour. Avec leurs revenus en berne, ils n'ont pas les moyens de se faire remplacer. Pour celles et ceux qui sont à bout et craquent, la Confédération paysanne a obtenu il y a deux ans le « droit au répit », qui se traduit généralement par du remplacement sur les fermes géré par la MSA* avec des crédits du ministère de l'Agriculture. Mais il faut éviter d'en arriver là. Il existe aussi un crédit d'impôt qui rembourse 50 % des frais pour 14 jours de remplacement annuel. Mais ça fonctionne très mal, les éleveurs l'utilisent très peu : il faut avancer l'argent et il reste la moitié de la somme à prendre en charge.

Notre objectif est de trouver les moyens pour assurer une journée de repos hebdomadaire pour tous les producteurs et toutes les productrices, soit environ 100 000 personnes. A 180 euros par jour, ce que coûte une journée de remplacement, cela fait un milliard d'euros à trouver. Rapporté au volume de lait produit aujourd'hui en France, ça correspond à 4 centimes par litre. Evidemment, nous voulons une aide à la personne : pas question qu'elle soit allouée en fonction du volume de lait produit dans chaque exploitation, comme le suggère déjà la FNPL* (2) ... En pratique, il faudra que les financement arrivent directement aux associations de remplacement, de manière à ce que les paysan·nes n'aient rien à avancer. L'objectif est de consolider ces associations pour qu'elles aient les moyens d'embaucher des vachers à temps complet et de professionnaliser la démarche.

Comment financer cet objectif ?

Nous voyons déjà quatre sources de financement. La grande distribution – qui écoule la moitié des produits laitiers en France - a déjà dit qu'elle pouvait mettre quelques centimes par litre, à condition que ça aille bien aux producteurs et pas dans l'augmentation des marges et des profits des industriels. A voir si elle le fait : elle pourra profiter de l'occasion pour redorer son blason (3).

Les industriels ont acté le plan de filière qui comporte un volet économique mais aussi un volet social sous la forme d'une « démarche de responsabilité sociale ». On peut espérer qu'ils mettront de l'argent dans ce cadre.

Du côté des pouvoirs publics, ils peuvent mettre au pot les sommes qui étaient destinées au crédit d'impôt qui ne fonctionne pas.

Enfin, la MSA* pourrait compléter. Les économies générées par les moindres dépenses de santé du fait de la baisse de la surcharge de travail et les sommes non-utilisées ainsi pour le droit au répit (4) pourraient contribuer au financement de la démarche. Nous ferions ainsi du préventif plutôt que du curatif !

N'oublions pas que le coût de ce dispositif est secondaire par rapport aux bénéfices engendrés en terme d'emplois (20 000 potentiels) et d'amélioration des conditions de travail qui facilitera le renouvellement des générations sur les fermes en rendant le métier plus attractif.

Comment la démarche est-elle perçue par les autres composantes de l'interprofession laitière?

Il n'y a pas eu de lever de bouclier. Mais on a déjà vu dans nombre de plans et de lois des objectifs n'être jamais atteints. C'est maintenant sur le financement que ça va se bagarrer. Qui va payer ? A quelle hauteur ?

Pour atteindre notre objectif, il faut continuer à le porter haut et fort. Et qu'on le fasse connaître dans les campagnes, qu'un maximum de paysannes et de paysans s'en saisissent et le soutiennent.

Propos recueillis par Benoît Ducasse

 

(1) Les plan des filières agricoles et alimentaires, dont celui de la filière laitière sont à télécharger sur : http://agriculture.gouv.fr/egalim-les-plans-de-filieres

(2) Fédération nationale des producteurs de lait, section spécialisée de la Fnsea.

(3) En mars 2016, Lidl avait mené une opération de « solidarité » avec les éleveurs en difficultés en prélevant 3 centimes par litre de lait vendu.

(4) En 2017, dans le cadre de l'aide au répit, la MSA* a accompagné 3 500 paysans et paysannes en situation de burn-out ou d'épuisement professionnel, à 40 % des éleveuses et éleveurs laitiers.

 

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