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VIE SYNDICALE
18.05.2021

Un pilier du combat pour l’agriculture paysanne

Mixel Berhocoirigoin nous a quitté dans la nuit du 7 au 8 mai. Homme de tant de combats, il fut entre autre le premier secrétaire général de la Confédération paysanne. Tout comme lui venant du Pays basque et ancien secrétaire général du syndicat, Mikel Hiribarren lui rend ici hommage.

Il en avait encore des choses à faire, notre Mixel Berhocoirigoin. Et nous avions contribué à le dissuader de le voir partir pour les élections régionales de cette grande Nouvelle-Aquitaine. Nous pensions que le Pays basque, toujours en reconstruction, aurait besoin de ce grand bonhomme. Hélas, la maladie qu'on lui a découverte en février, ne lui a laissé aucune issue, et nous l'avons remis le 13 mai à la terre qu'il avait su préserver, et qui veillera sur lui : « Zuk lurra zaindu baituzu, lurrak zainduko zaitu zu » (1).

Le dernier hommage d'un peuple a eu lieu sur sa terre de Gamarthe, son village de toujours à tout jamais, son point d'ancrage permanent. C'est là que nous étions pour chanter au fond de nos cœurs « agur jauna », des centaines de Basques d'abord, mais aussi des syndicalistes paysans de l'Hexagone comme de toutes les provinces du Pays basque. A la sortie de la célébration religieuse, du balcon de la mairie, encore nichée sur le clocher de l'église de Gamarthe, Maite Aristegi et Txiplas Arriaga, ses amis syndicalistes paysans des provinces de Saint Sébastien et Bilbao, lui ont chanté toute la reconnaissance du peuple basque et du peuple des paysans du monde.

Faut reconnaitre que beaucoup de confédérés auront souvent écorché le nom de famille de Michel. Les gendarmes qui l'interrogèrent fin 2016 suite à une action de désarmement, ne parvenaient jamais à le prononcer ce « Berhocoirigoin ». Michel, qui vécu là des jours d'une grande violence,  s'amusait ensuite à en rapporter la scène, lui qui aimait tant plaisanter et savait animer les moments de convivialité. Nous l'appelions tous Berhoco, et il en convenait. Ce serait quelque chose comme « De la haie », forcément haie vivace. Ce qui raisonne en basque comme borroka, la lutte. Nous le rebaptiserions bien sous l'appellation Borrokairigoin, et l'essentiel du parcours de notre homme serait condensé là, tout à son honneur.

Il a eu le parcours des jeunes de son époque, 20 ans en 1972, avec une très forte envie de comprendre et d'agir sur son monde, et sur le monde. Peio Iralour, son frère d'armes du canton de Saint-Jean-Pied-de-Port atteste de sa solide formation dans les mouvements d'action catholique : « Tu aimais dire que le MRJC avait été pour toi une université dans les années 1965-1975. »

A partir de là, il en aura mené des combats. Jamais seul. Toujours avec les autres, avec le collectif. A écouter, échanger, réfléchir, formuler, convaincre, agir. A travailler le fond des dossiers, à rédiger des notes précises et argumentées. Il nous a toujours recommandé de préparer les interventions, même sur les sujets que nous maitriserions parfaitement, il insistait à dire qu'il fallait intervenir sur toutes les réunions pour porter la parole de notre collectif, syndical ou plus politique.

Pour évoquer le parcours de vie, revenons aux paroles prononcées par Peio Iralour lors de la cérémonie d'adieu : « Tu en as ouvert des chantiers ! Tout jeune tu as fait du théâtre, en contribuant aussi à l'écriture collective des textes… Puis tu as participé au syndicat CDJA/FDSEA*. En désaccord avec ses orientations, tu as été de ceux qu'on appelait à l'époque le groupe des 40 : continuer à la FDSEA* ou construire un syndicat qui prône une autre politique agricole, qui défend vraiment les petits paysans ? La décision fut difficile à prendre et la détermination des agricultrices fut décisive pour créer en 1982 la nouvelle structure syndicale ELB* (3). Puis, au niveau national, tu participas à la création de la Fadea d'abord, et de la Confédération paysanne en 1987. Tu as été un des acteurs déterminant de chacune de ces structures. De 1989 à 1993, tu assurais les fonctions de secretaire général de la Conf'. Ensuite, ce fut Batera, combat pour revendiquer en Pays Basque de France un département, une chambre d'agriculture, l'officialisation de la langue basque et un pôle universitaire. En 2005, ce fut la création d'EHLG, la chambre alternative du Pays Basque (4), avec les procès intentés par l'Etat qui furent emportés par EHLG que tu présidais. Et cette dernière décennie, tu t'es très fortement impliqué dans le processus de paix du Pays Basque, la reconnaissance des victimes et surtout la libération des prisonniers basques des geôles françaises et espagnoles ». Tout ça. Et sans doute davantage !

Il faudrait des pages pour conter tout les combats que Michel a animés et accompagnés, avec les camarades du Pays, et avec tous les militants et militantes de France et de Navarre, inlassable artisan de justice.

Militant paysan infatigable, soutenu par l'amour indéfectible de sa famille, profondément ancré dans l'histoire de son peuple, doté d'un savoir-être et d'un savoir :faire magnifiques. Nous lui disons «  Bravo et Chapeau ». Et lui de nous renvoyer : «Atxik, atxik : ne lâchez rien ! »

 

(1) « Parce que vous avez pris soin de la terre, la terre prendra soin de vous. »

(2) Le 16 décembre 2016, Mixel Berhocoiriogoin avait été interpellé à Louhossoa, avec 4 autres militants de la paix au Pays basque, lors d'une opération de police pour empêcher la société civile de procéder à une destruction d'armes de l'ETA, puis gardés à vue durant quatre jours.

(3) Euskal herriko Laborarien Batasuna :  https://fr-fr.facebook.com/ehlaborarienbatasuna/

(4) Euskal Herriko Laborantza Ganbara : https://ehlgbai.org/

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