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CAMPAGNES SOLIDAIRES
05.01.2022

Notre situation face au diktat sanitaire

Nous produisons des oeufs et des poulets de chair bio depuis trois ans, en système autarcique (accueil des poussins à un jour et abattage et vente à la ferme). Notre réussite est basée sur les riches parcs arborés sur lesquels nous laissons nos animaux croître et s'épanouir. Nous avons d'ailleurs été aidés par la région pour financer la plantation par un chantier participatif de 800 arbustes d'espèces locales et mellifères en 2018, ce.qui nous a permis de gagner le prix du développement durable de notre communauté de communes.
Un système de bâtiments donnant chacun sur deux parcs permet une rotation très longue des occupations par les animaux, à savoir des vides sanitaires de 5 mois, contre les 2 exigés par le cahier des charges bio.
Nos clients sont unanimes quant à la qualité des produits dont nous manquons toujours.
Mais voilà deux ans que nous nous ruinons la santé, le moral et les comptes à appliquer les consignes officielles pour lutter contre la diffusion de la grippe aviaire. Notre site préservé en bordure de rivière s'est transformé en ZRP, zone à risque particulier, l'horreur absolue. Bien sûr, nous nous sommes formés à la biosécurité - c'est une obligation professionnelle - et tout notre site répondait aux critères exigés, ce qui nous a valu de bonnes appréciations, tant du vétérinaire référent que de l'administration.
L'an dernier, une sorte de cas par cas nous avait permis, après visite de contrôle, de maintenir notre activité tant bien que mal, avec des volières permettant dérogation à la claustration et une réduction d'espace « supportable ». Bien que constatant déjà une dégradation de la qualité de notre élevage et un mal-être des animaux, nous courbions le dos en attendant la libération printanière.
Mais depuis septembre, les contraintes se sont durcies au point de rendre impossible notre travail. L'espace laissé à nos animaux est tellement ridicule qu'il nous rend coupable de maltraitance. La complaisance des acteurs du cahier des charges bio a fait de nous des menteurs quand on nous permet de vendre des poulets étiquetés bio après leur avoir jeté un seau d'herbe sur la litière quotidiennement.
Nous avons essayé de répondre aux exigences sanitaires appliquées depuis le début de la crise mais  le métier que nous pratiquions n'est plus possible selon ces contraintes. Il est impossible de fermer des animaux ayant déjà connu l'extérieur, impossible d'élever sans souffrance ni recours médicamenteux des races à croissance lente sur un espace de terre qui en période hivernale s'apparente à une bauge. En évitant un péril sanitaire de cette manière, nous nous précipitons dans cent autres.
Si ces mesures perdurent, nous ne pourrons supporter le coût des adaptations, ni la perte économique qui suivra fatalement la baisse de qualité de nos produits et, bien sûr, nous ne pourrons plus nous supporter nous-mêmes quand nous aurons trahi toutes les raisons fondamentales qui nous ont poussé à devenir éleveurs et éleveuses, et non pas seulement marchands de viande.
S'il faut le redire, redisons-le : les animaux sont faits pour vivre dehors ! L'enjeu est fondamental, notre alimentation est en péril. L'industrialisation ne peut pas apparaître comme une solution : elle est à l'origine de la crise. Il est de notre devoir d'assurer pour toutes et tous une alimentation de qualité, fruit de pratiques conformes au vivant et qui n'empêchent pas les autres d'exister. Ne nous laissons pas abattre !

Dimitri et Estelle Bon, paysan·ne dans le Jura,
novembre 2021

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