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COMMUNIQUE DE PRESSE

Lettre ouverte à manuel Valls : Plan d'urgence pour les paysannes et paysans victimes de la crise

22.09.2016

Monsieur le Premier ministre,

Vous vous apprêtez à présenter de nouvelles mesures pour sortir les paysans de la crise dans laquelle ils s'enfoncent jour après jour. Jusqu'à présent, les solutions apportées ont été insuffisantes, voire contre-productives. Cibler les soutiens sur le refinancement, donc le réendettement, a accentué la situation actuelle. Accompagner les cessations d'activité n'a fait que détruire encore plus le paysage agricole, et le quotidien de ceux qui restent. Il est temps d'agir pour que la vie reprenne sur les fermes et dans les familles, et il y a urgence à agir sur la crise elle-même et sur ses causes !

Nous vous écrivons pour vous présenter notre plan d'urgence, que n'aura pas manqué de vous transmettre votre ministre de l'Agriculture. Dans un premier temps, il est indispensable de prendre en compte le fait que c'est toute l'agriculture qui est en crise. L'élevage laitier, certes, mais aussi toutes les productions animales, les céréaliers des zones intermédiaires, mais aussi toutes les productions végétales, sans oublier l'apiculture ou la conchyliculture. Pour être efficace, ce plan doit donc être ciblé vers les paysannes et paysans les plus touchés par la crise. Les aides que nous proposons doivent être automatiques pour ceux qui ont obtenu un minima social et ceux qui sont en cours de procédure collective. Elles doivent être accessibles pour ceux qui sont confrontés à de fortes baisses de trésorerie et/ou dont le taux d'endettement court terme est élevé.

De tout le territoire remontent des nouvelles alarmantes. Dans tous les secteurs, ils sont nombreux à travailler au quotidien en perdant de l'argent. Ils n'ont plus de quoi nourrir leurs familles ou habiller leurs enfants en cette rentrée. Faute d'argent disponible, les fermes se détériorent, on imagine mal comment semer pour l'année prochaine, ou comment remplacer telle pièce du tracteur. Ce plan a donc un double objectif : faire bouillir la marmite, car les paysans et leurs familles doivent pouvoir assurer le quotidien ; et faire tourner les fermes, pour qu'elles puissent continuer à assurer l'avenir une fois la crise passée.

La prime d'activité, voire le RSA* socle, sont des outils appropriés pour faire rentrer de l'argent rapidement dans les foyers. Sauf que, aujourd'hui, il faut six mois entre la demande et le versement ! Les familles dont nous parlons sont dans l'urgence, elles n'ont pas six mois devant elles… Les demandes doivent donc être traitées dans les 15 jours, et les droits ouverts pour un an au lieu de trois mois actuellement. A cela doit s'ajouter un déclenchement automatique des autres aides sociales. Le fonds social de la MSA* doit être mobilisé.

Ce fonds doit aussi permettre de financer l'accès à un service de remplacement gratuit pour que les paysans puissent souffler et/ou être soutenus dans leur travail. La situation est devenue trop grave pour qu'on puisse se permettre de penser des solutions sans prendre en compte l'épuisement psychique des paysans et les drames humains qui se jouent chaque jour. C'est aussi pourquoi nous vous demandons instamment de veiller à ce que tous les opérateurs impliqués (DDT, MSA*…) assurent leur mission avec le plus grand respect pour les paysannes et paysans.

Les fermes ont besoin de retrouver du souffle, sans que cela pèse sur leur avenir. Nous demandons donc une aide à la trésorerie d'un montant allant de 5 000 à 10 000 euros. Il n'y a pas d'argent nous direz-vous ? Pourtant, dans le secteur agricole, nombreux sont ceux qui vivent bien, très bien même. L'agroalimentaire, la grande distribution, les banques, les assurances, les coopératives, ne vivent que parce que les paysans travaillent, quel que soit ce qu'ils gagnent ! Il est inacceptable que certains puissent annoncer des bénéfices record quand d'autres s'enfoncent et perdent espoir. Le projet de Loi de finance qui sera présenté en conseil des ministres à la fin du mois doit être l'occasion de créer une contribution de tous ces acteurs du secteur pour abonder un fonds qui sera complété par l'Etat pour venir renflouer les trésoreries des fermes en difficultés.

Au-delà de cette aide spéciale, votre gouvernement doit tout mettre en œuvre pour que cesse le cauchemar de la mise en œuvre de la Politique agricole commune. Une application française qui n'en finit pas d'être finalisée, des avances de paiement qui ne viennent pas, des paysans exclus pendant plusieurs mois des aides parce que déjà trop en difficultés, des exclusions injustifiables… Les ATR (Apport de trésorerie remboursable), doivent arriver dans les fermes comme prévu au 16 octobre ! Par ailleurs, comme cela a été fait au Portugal, un complément d'aide doit être apporté sur les aides couplées animales, pour les premiers animaux.

Une vraie volonté de soulager les trésoreries impliquerait des mesures fortes comme l'instauration d'un moratoire sur les échéanciers de paiement, la suspension des poursuites, et la prise en charge des cotisations sociales forfaitaires (Atexa et IJ maladie).

Enfin, il faut aussi aider les paysans à assurer la continuité de leur travail : aides à l'achat de semences (avec autorisation de cession des semences de ferme), mécanisme de solidarité entre producteurs pour le fourrage, la paille et les aliments du bétail, soutien renforcé aux nouveaux installés… L'outil de production ne doit pas être sacrifié. Au contraire, il doit absolument rester opérationnel pour assurer l'avenir ! Pour les situations économiques compliquées, il est nécessaire de mettre en place une campagne d'information et de sensibilisation des agriculteurs sur les procédures judiciaires, et d'assurer la prise en charge des frais de procédure et l'accompagnement nécessaire.

Monsieur le Premier ministre, toutes ces mesures ont été pensées pour leur effet rapide et positif pour les paysans. Il ne s'agit pas ici de parler de la place de l'agriculture française dans la compétition internationale, nous parlons des hommes et des femmes qui se consacrent jour après jour à produire l'alimentation de nos concitoyens, qui ont choisi un métier par passion et qui se retrouvent victimes d'un système qui ne les considère plus.

En parallèle, il faut mettre fin à cette crise née de la dérive d'un système agricole à bout de souffle. Des mesures de régulation des productions doivent être mises en place et il faut accompagner les paysans dans une transition qui permette à l'agriculture de retrouver sa place dans la société, d'être créatrice d'emploi et de vie sur les territoires.

Vos choix auront un impact immédiat sur les paysans. Nous sommes de moins en moins nombreux et, sans une action réellement efficace de la part des pouvoirs publics, le plan de licenciement massif en cours va encore s'accélérer ! Vous ne devez pas être celui qui actera la disparition de notre agriculture !


Contacts :
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Laurent PINATEL - Ancien porte-parole de la Confédération paysanne - tél: 06 80 58 97 22
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